concert Maria Joao Pires et Kaoru Kakizakai: article

Image instantanée
La scène du théâtre des Champs Elysées à Paris:
à gauche, une femme de taille modeste
à droite, un homme plutôt grand.

Sur scène tout le long du concert:
elle, assise en permanence derrière le clavier, toujours face à lui
lui, tantôt au centre face au public, tantôt assis devant une table sur laquelle
sont posés bouteille et verre d’eau, l’oreille droite toujours tendue vers elle.

Un instrument unique pour chacun:
un grand piano
un seul shakuhachi, long, pour toute la durée du concert.

Ecoute
un syle choisi, unique pour chacun:
des sonates de Beethoven
des Koten Honkyoku,
les pièces s’intercalent les unes après les autres,
le shakuhachi démarre avec Tamuke et fini le concert sur Sanya (Montagnes et Vallées),
laissant Beethoven s’intercaller entre et parmi d’autres honkyoku.
Sanan sera jouée en rappel avant que Beethoven ne conclue la soirée, et enfin le public applaudira.

La concentration est au maximum, l’écoute l’un de l’autre permanente.
Le fil conducteur de la musique est tenu sans interruption jusqu’à l’entracte et au rappel.
Attrapper le fil au passage et le faire passer d’un instrument à l’autre,
- par le silence toujours en mouvement - par le souffle tranchant d’un muraiki -
par un effet de gouttes d’eau perlées des petites mains qui courent sur le clavier sans briser le mouvement.
Parfois lors des transitions les sons se tuilent dans notre mémoire,
les dernières phrases d’un Beethoven venant courir au dessus des longues tenues du bambou.
Le verre d’eau restera immobile pendant tout le spectacle.

Ressenti
Du Beethoven et du Koten Honkyoku?
Beethoven, la musique est complexe, les thèmes et les tempi se succedant l’un derrière l’autre,
les phrases s’étirent exposant les thèmes et leurs développements qui se succèdent l’un après l’autre.
Le shakuhachi lui étire son souffle jusqu’à la dernière goutte, les gestes sont très précis et économes.
On a certainement l’image d’un Beethoven plutôt expressif, extraverti,
oui, mais ici c’est de son monde intérieur dont nous parle Maria Joao Pires,
répondant en écho au monde du shakuhachi vu par Kaoru Kakizakai.

L’idée était simple.
Le faire? Il fallait l’oser!
Ces deux grands musiciens y étaient de tout de manière prédestinés.
Bien sûr, il y a eu les déçus de ne pouvoir entendre quelques duos,
ah! mais alors, lesquels?
En tout cas tout le monde y aura trouvé son compte,
et peut-être découvert ou re-découvert tout ou une partie de l’autre moitié.

(Véronique PIRON, octobre 2010)
article paru dans la lettre d'information
de la Fédération Européenne du Shakuhachi (ESS), oct 2010:

http://www.shakuhachisociety.eu/essnewsletter.html